Je rencontre, aujourd’hui, une personne qui est en analyse.
Elle me dit :
« Ce qui est extraordinaire pour moi, c’est que je rencontre – trois fois par semaine – quelqu’un qui m’écoute et qui est tout attention à mes propos. Trois fois par semaine, je deviens le centre de la préoccupation de quelqu’un. Bien sûr, le psychanalyste me demande des honoraires élevés. Bien sûr, lorsqu’il m’écoute, il le fait par métier et, quand je réfléchis, je sais bien qu’il n’est pas là par amour mais par profession… Mais cela ne fait rien ! Trois fois par semaine, quelqu’un m’écoute et je deviens tout pour lui, pendant cinquante minutes! »
Je garantis que j’ai entendu ce discours et je l’ai profondément compris !
Faut-il en arriver à des difficultés énormes ou à une solitude épaisse et oppressante pour vivre, provisoirement au moins, avec l’aide d’un mercenaire de l’écoute ?
Ce n’est pas un cas isolé et de multiples dialogues me disent pratiquement la même chose. La plupart du temps, je suis certain que les gens ne sont pas malades mais, comme chacun de nous, ils vivent difficilement l’épreuve de la ville où il faut trouver, en soi-même, l’énergie de la solitude et de l’anonymat pour vivre la liberté du choix.
4 mai 1978
Article précédent
L’Europe économique
Article suivant
Rien et tout