J’ai relu Alfred de Musset dans le poème « La nuit» où la Muse déclare :
« Poète, prends ton luth et me donne un baiser ;
La fleur de l’églantier sent ses bourgeons éclore »
En ces deux vers, le poète Musset ouvre le printemps et laisse entendre ce qu’est le rôle du poète dans la société humaine.
Il fait parler les plantes et les animaux après les avoir lui-même entendus dans sa sensibilité hors du commun. Ce qu’il découvre, il ose le dire et l’écrire. Il partage avec la société pour lui faire découvrir ce qu’elle ne perçoit pas.
Un jour, j’étais adolescent. Je suis allé au théâtre avec une amie de ma mère qui était institutrice à la retraite. Avec talent, on ‘tentait’ de jouer du Charles Péguy : Le Mystère de la Charité de Jeanne d’Arc. Sur scène, l’actrice n’avait pas fini de dire : « Les anges dans la nuit avaient formé des chœurs, les anges dans nuit chantaient comme des fleurs » que ma voisine me dit à voix basse : « Mais qu’est-ce qu’elle raconte ? Les fleurs ne chantent pas ! »
Sans lui, le poète, un pan entier de la création nous resterait scellé. Il nous fait entrer dans l’inconnu qui n’existe qu’en lui. Cette part de vérité, ce versant de création, il est chargé de les proclamer pour que nous ne restions pas terre-à-terre dans la description géométrique ou biologique.
Il rejoint les peintres, les musiciens, les photographes de l’école d’Arles, pour nous aider à trouver les mots, les sons, les descriptions, les aspects de la beauté qui pourtant ne se définit pas. Il complète notre formation.
A Amsterdam, je me suis assis devant la « Ronde de nuit » de Rembrandt (1642) pour qu’elle me suggère des réflexions nouvelles qui ne m’avaient jamais effleuré.
La culture humaine n’est pas que scientifique. Elle déborde même « le littéraire » pour nous conduire jusqu’à une sensibilité personnelle qui nous ouvre à l’infini, qui nous rejoint et nous instaure dans toutes les capacités humaines.
Merci à ceux et celles qui, par leurs « talents », nous offrent les premiers pas d’une plénitude.
14 juin 2021
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