Je repense à ma rencontre du 20 avril où nous avons parlé de l’hypothétique voyage au Canada de dix-sept travailleurs sociaux de Lyon.
Si j’ai bien compris, leur revendication est de faire payer leur salaire par leur organisme employeur durant leur voyage, c’est-à-dire de transformer « en formation » ce qui semble à première vue un voyage intéressant, à base professionnelle.
Je connais plusieurs personnes dans ceux qui doivent faire le voyage ; ils ont déjà profité, dans l’année, de stages de formation.
D’autres ont fait grève parce qu’il manquait du personnel et, en début d’année scolaire, ils s’apprêtent à partir quatre ou cinq semaines.
Que la DASS ait besoin d’une mission d’étude et qu’elle envoie deux ou trois travailleurs sociaux au Canada pour faire le point de la question, je le conçois assez bien ! Qu’elle en envoie dix-sept… Cela me semble étrange !
Bien que l’Office québéquois subventionne en partie, j’ai appris également que les dix-sept devraient financer l’opération à un coût assez élevé : 1.500 à 2.000 Francs.
Tout cela me trouble, non pas sur ceux qui ont fait ce choix, mais sur le service social lui-même.
La formation est infinie et seule la détermination d’un seuil raisonnable par les travailleurs sociaux eux-mêmes peut réguler cet appétit. Cette boulimie, en effet, me semble liée à leur désir d’être sans cesse plus compétents ou mieux, à l’aise dans leur poste et dans leur peau.
Je sais ce métier difficile, mais la formation est-elle le seul moyen de résoudre la peur qu’il engendre ? Je redoute que ce soit le contraire !
Pendant que l’on est en stage de formation, on est au moins éloigné de l’agression lancinante des clients qui demandent l’impossible à des travailleurs aux mains nues.
Ne faudrait-il pas chercher la solution ailleurs qu’au Canada ?
22 avril 1978
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