Luc 1, 40

Virginité

J’ai devant moi la photographie d’une sculpture qui orne le devant de l’autel de la paroisse de Saint Rambert, près de l’Ile Barbe, au nord de Lyon. L’artiste a représenté naïvement la rencontre de Marie et d’Élisabeth. Mystère de deux femmes enceintes. L’Écriture dit l’une vierge, l’autre non.

En l’une, vit Jésus qui, blottit en sa mère, va vers la naissance ; en l’autre, tressaille déjà Jean, l’aîné de son petit cousin. Deux saintes femmes, deux fécondités analogues, reconnues et distinguées par notre foi.

Leurs regards prennent l’assemblée chrétienne à témoin de leur joie. La douceur de leurs visages et l’élan de leurs corps annoncent le mystère. Elles font face au peuple de Dieu ; leurs grands yeux et leur sourire livrent leur secret d’amour à ceux qui se rassemblent pour la louange eucharistique. Ces deux femmes m’entraînent dans la contemplation du don de Dieu qui crée, dans la foi, la virginité de l’offrande qui est beaucoup plus que la virginité corporelle.

En ce qui concerne la mère de Jésus, je crois que le message de l’ange et la réponse libre et disponible de Marie engendrent la virginité : Marie est vierge à cause de la gracieuseté de Dieu. Quand elle la comprend, elle se livre à elle. Ce n’est pas l’absence de relation d’amour avec un homme qui la rend vierge, mais la bonté de Dieu à son égard et son désir d’y correspondre de toute sa force.

La ferveur de son consentement bienheureux et son acquiescement généreux donnent à son corps toute son intensité, sa force, sa puissance d’amour ; elle se livre à la munificence divine. La liberté de Dieu la pétrit de liberté. La dilection de Dieu entraîne son propre amour désintéressé. Le penchement de Dieu et son désir d’y répondre pour coopérer au Salut du monde la rendent vierge.

Ce mystère d’amour, je le devine et le contemple, encore de nos jours chez nombre d’hommes et de femmes que le don de Dieu rend vierges. Bien sûr, ils sont différents de Marie, la mère du Sauveur, mais leur désir s’en rapproche. Spirituellement, ils désirent consacrer la totalité de leurs forces à l’incarnation mystérieuse du Christ-Ressuscité dans la spécificité de leur culture et de leur spiritualité.

Leurs pauvres corps faillibles, touchés par la grâce inexplicable, rayonnent une limpide disponibilité et une offrande sans réserve.

Oui, je crois que, dans sa bienveillance, Dieu communique la beauté de sa vie Trinitaire. Aujourd’hui encore, au-delà des approximations cahotantes d’une existence humaine, le Seigneur donne la virginité à qui choisit d’en vivre humblement au sein d’une communauté de baptisés. Ce signe est accueilli comme une promesse de gratuité pour la joie d’un peuple qui demande à être aimé avec délicatesse et passion, pour grandir dans la foi.

Dans l’invisible d’Amour, tout s’exprime en « au-delà », et en termes de la foi, comme la Résurrection et l’Eucharistie…