Le temps du silence
Zacharie, un prêtre âgé, attaché au service du Temple, exerçait avec application son ministère avec ses collègues du groupe « Abia » mais il était triste, car il n’avait pas d’enfant. Son épouse Élisabeth était stérile et, de plus, elle n’était pas de première jeunesse. L’un et l’autre portaient le fait de ne pas avoir d’enfant comme une souffrance profonde, Élisabeth parlait même de honte. Les deux membres du couple avaient beau être justes, pratiquants et irréprochables, ils n’avaient pas de descendance et n’arrivaient pas à sortir de leur chagrin.
Or, un jour que Zacharie assurait le service du culte, un messager de Dieu, chargé des commissions importantes de Yaweh, fit comprendre au prêtre qui se trouvait dans le sanctuaire du Seigneur, qu’il allait avoir un enfant, de plus un fils.
Ce rejeton ne serait pas destiné uniquement à dissiper son chagrin et celui de son épouse, mais il serait un homme exceptionnel pour le peuple entier. Il s’appellera Jean. Il échappera à la tradition familiale et ne se nommera pas selon la coutume comme un des membres de cette honorable famille. Il ne sera pas non plus prêtre du Temple à Jérusalem.
Ce garçon, habité de l’Esprit d’Élie, le grand prophète du peuple d’Israël, sera d’abord un prédicateur pour préparer la venue du Messie. Il appartiendra à Dieu, à lui-même, au peuple avant d’être un bon fils qui suit la filière sacerdotale.
Il sera la joie du couple, mais sa fécondité dépassera de beaucoup Zacharie et Élisabeth. Il vivra au désert et aura des paroles fortes. D’une certaine manière, il échappera aux convenances. Il sera lui, libre de tout. Dans la pauvreté et la vérité, il inventera avec passion son propre parcours, quel qu’en soit le prix.
Zacharie fut bouleversé. Il avait entendu et compris le message. Restait à l’expliquer. Ce serait délicat et difficile. Cette fécondité le dépassait. Il n’arrivait même pas à l’imaginer, il n’en avait pas les moyens :
Il valait donc mieux qu’il garde le silence et mûrisse dans la contemplation muette l’obscurité joyeuse et effroyable de la fécondité qui échappe aux normes habituelles pour devenir un bien du peuple. Il fallait du temps à Zacharie pour intérioriser l’insondable désappropriation personnelle de la fécondité. Il ne pouvait pas prévoir tout de suite. Il devait d’abord entrer en patience.
Que l’on me permette de croire que le mutisme n’est pas, pour lui, une punition? mais une condition pour approfondir le mystère et intérieurement s’y soumettre !
Ce passage de l’évangile fortifie en nous le goût de l’oraison et de la contemplation, lieux d’affinement en nous du mystère de Dieu qui nous dépasse et nous plonge dans l’adoration silencieuse et féconde. Un jour, s’accomplit autrement que prévu ce que nous avons mûri dans le silence et dont nous nous sommes détachés.
22 décembre 2008
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