Prophète
Comme tous les hommes, les prophètes habitent un lieu. Ils parlent la langue du pays et s’expriment en empruntant la symbolique de la culture locale.
Famille et voisins s’inquiètent : « Qu’est-ce qu’il raconte : il dérape – il dit n’importe quoi ; ne l’écoutons pas, nous n’avons jamais entendu de tels propos ».
La nouveauté dérange. La géographie régule et tient son rôle de plus petit commun multiple.
Les messages audacieux allument des incendies. À la fois, ils séduisent et créent des divisions.
Tous ces motifs et beaucoup d’autres peuvent expliquer la remarque de Jésus : « Je vous le dis, aucun prophète n’est bien accueilli dans son pays ».
Mais la seule raison, me semble-t-il, doit être puisée ailleurs. Un prophète n’est jamais d’ici ou de là, mais d’autrement, village que l’on n’atteint jamais, vers lequel on marche indéfiniment et que l’on ne cerne pas. On ne peut s’y reposer. Il s’éloigne à mesure que l’on s’approche. À chaque tournant, il est un peu plus loin. Et pourtant ce n’est pas un mirage ! Il est du canton de la réalité. Ses citoyens s’appellent les « sanctifiés ». Dieu les rend saints de sa sainteté ; ils ont pour loi de ne point en avoir et vivent sans projet.
Dans le Royaume qui ne cesse d’advenir, les prophètes sont en même temps de leur époque et déjà de la Résurrection. Proches ou inconnus, ils font peur tant ils sont vrais.
1 janvier 1998
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