Ch. 19 – Mementos et homélies

Parmi les compagnons, plusieurs sont devenus des amis ; je suis ainsi devenu un ami de la famille. La relation d’amitié se poursuit aujourd’hui avec les enfants. Nombre d’entre eux sont morts. J’ai été appelé à témoigner ou à prononcer une homélie à leurs funérailles.

Homélie à la sépulture de Jean-Pierre Tixier (1er septembre 1977, Saint-Cyr-au-Mont-d’Or)

On avait prévenu Jésus que son ami Lazare était mort. Il décide de se rendre chez lui. Là, il rencontre tous les gens du pays qui sont venus consoler Marthe et Marie et partager leur peine. Dans ce village, on devait beaucoup aimer cette famille.

Jésus vient comme les autres pour consoler et pourtant, sa présence va bien plus loin. Le dialogue qu’il a avec Marthe, révoltée mais pourtant croyante, débouche sur une promesse fulgurante : « Ton frère ressuscitera ».

Nous croyons que Jean-Pierre vit avec Dieu et, si nous voulons déjà nous rapprocher de lui, il nous faut alors dépasser chaque fois que l’on peut les mesquineries et les contingences de la vie, en nous attachant à l’important et en négligeant les vétilles.

Nous croyons que Jean-Pierre vit avec Dieu et, si nous voulons déjà nous rapprocher de lui, nous devons nous rapprocher de lui et lui laisser une place dans notre cœur.

Nous croyons que Jean-Pierre vit avec Dieu et, si nous voulons déjà nous rapprocher de lui, nous devons nous efforcer de ne pas laisser l’obscurité nous envahir, de ne pas être des hommes et des femmes de ténèbres mais lire au grand jour notre vie.

Nous croyons que Jean-Pierre vit avec Dieu et, si nous voulons déjà nous rapprocher de lui, nous devons nous efforcer de vivre le pardon et de ne rayer personne de notre amour.

Si la mort qui relativise toutes choses nous apprenait à porter les fardeaux les uns des autres, alors elle ne serait pas stérile.

Dans notre assemblée, ce matin, il y a peut-être beaucoup de personnes qui ne partagent pas la Foi en Jésus-Christ. Comme les croyants, ils sont interrogés par la mort et, comme les croyants, ils recherchent dans l’amour fraternel le support et la force pour vivre la contradiction de la souffrance et de la mort.

Ils respectent sans doute notre foi et luttent pour une vie fraternelle.

Ce dont je suis sûr, c’est que Dieu nous aime tous d’un même amour et qu’il nous appelle à nous aimer les uns les autres.

Nous allons célébrer l’Eucharistie, manger le Pain de Vie, le germe de Résurrection, le corps du Christ. En faisant du fond du cœur cette démarche, nous témoignons que la vie humaine n’est pas uniquement terrestre et nous tissons des liens d’amour entre nous tous.

Qu’il en soit ainsi…

Portrait de René Tixier (1920-2020) : Attention, intelligence, courage (6 juillet 2020)

Une maille à l’endroit

Une maille à l’envers

Comme mon frère Marc, son ami

René m’a beaucoup appris…

Il y a deux ou trois ‘paires d’années,

Nos sentiers se sont perdus

Dans les sous-bois de la vieillesse.

Si je le revoyais nous serions amis,

comme avant, comme toujours.

6 juillet 2020

Paul Fragnaud (Saint Bonnet de Joug, 11 avril 1978, Lettre manuscrite à Henri Fragnaud)

Torturé par la mort et la solitude, l’arbre se tient debout sur un fond mystérieux de brumes incertaines.

Vieux Seigneur de la colline, Paul Fragnaud s’en est allé vers son Seigneur. Effacé, sans bruit, lourd d’années et d’expériences, il nous a quitté vous laissant comme héritage sa sagesse.

Plus vous la partagerez, plus elle foisonnera. Bien plus qu’un patrimoine foncier écorné par les difficultés économiques de la vie présente, il vous lègue son opiniâtreté.

Je le crois fidèle à sa famille et à sa terre. Bien planté dans la solitude, environné d’un silence grave et impénétrable, il a duré et il a maintenu face au vent.

Je ne sais ce que l’avenir te réserve, mais je souhaite de tout cœur que les qualités de ton père se greffent avec les tiennes pour que tu deviennes à ton tour « Seigneur de la colline ».

Je prie avec vous tous et redis à chacun ma profonde affection.

Que le Dieu plein de tendresse et de miséricorde vous ait en sa sainte garde !

Memento aux funérailles de Gustave Mollard (14 avril 2006, Paroisse Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus)

Samedi dernier, à l’hôpital cardiologique, j’ai dit « A Dieu » à Gustave Mollard. Comme pour conclure notre pèlerinage terrestre de plus de trente ans, je l’ai embrassé. J’avais une grande affection pour Titi :

Titi m’a beaucoup appris

Titi a beaucoup apporté à ceux qui le fréquentaient.

Son humanité, son amitié, sa franchise, sa force ont été un cadeau précieux d’abord pour sa famille, pour ses nombreux amis, pour la société, spécialement celle de Villeurbanne.

A Dieu Titi ! Nous nous reverrons. 

Memento aux funérailles de André Charles Pelletier (3 février 2010, église de Meximieux)

Je m’appelle Christian Montfalcon. Je suis prêtre catholique du diocèse de Lyon. Je connais André Charles depuis une vingtaine d’années

Un peuple n’est pas une foule.

Un peuple, ce sont des personnes en relation :

Un peuple est un Corps vivant où chaque membre apporte à tous les autres, non seulement ce qu’il fait, mais ce qu’il est.

Je peux donc témoigner de ce que j’ai reçu d’André Charles Pelletier aussi bien à Meximieux, sur le plateau du Retord qu’au bord des étangs des Dombes.

Pour moi André Charles fut un Juste, c’est-à-dire quelqu’un qui n’est ni trop, ni pas assez :

Il est « juste » avec lui. Il ne s’en demande pas plus qu’il ne peut assumer, car il a compris que respecter ses limites contribue à l’efficacité pour les autres. En définitive, le juste réfléchit, pèse, décide, agit. L’amour le guide et lui donne force et efficacité.

Le juste n’est pas un parfait. Il a certainement des défauts, des faiblesses et des failles. Mais sa qualité de juste est un don pour un grand nombre de personnes.

Par André Charles, je crois que Dieu m’a parlé.

Merci? André Charles? d’avoir été pour beaucoup d’entre nous un messager ! Vous avez contribué à faire une société plus juste et donc plus humaine.

Des amis

1 septembre 1977