« Seules la foi, la prière, l’offrande, l’ascèse peuvent nous débarrasser des scories du point d’honneur »
La préparation des trois jours d’accueil de Mgr Balland me plonge dans la perplexité. L’énergie dépensée par une dizaine de personnes à temps plein pour monter célébrations et rendez-vous me semble exagérée. Tout est compliqué : invitation, inscription, préséance, liturgie, télévision, menu, transport, police, officiels, mufti, rabbin, Églises sœurs, conférence de presse, pot de l’amitié, concertation entre partenaires… Les détails fourmillent, les susceptibilités s’aiguisent. Heureusement que l’équipe travaille dans la bonne entente. Point de jalousie, acharnement et délicatesse font la paire, l’efficacité en prime.
Ces équipes performantes tournent comme une horloge. Tout sera prêt à temps et je puis assurer que ce n’est pas la vaine gloire qui motive ces hommes et ces femmes. La gloire de Dieu, le sens de l’Église, la joie du bel ouvrage, les poussent à l’action désintéressée. Ils agissent parce qu’un nouvel évêque arrive et que la fête d’accueil doit être au même niveau que la célébration de l’adieu du Père Decourtray.
Et pourtant, un malaise demeure en moi… Et si c’était trop ? Ne visons-nous pas trop haut, trop bien, trop parfait, trop étudié ? Ne sommes-nous pas au-delà du possible pour nos petits moyens ? Cette fête sera-t-elle assez populaire pour que le peuple tressaille pour la mission selon l’Évangile ? La mobilisation annoncera-t-elle l’Église servante et pauvre à la manière de Jésus-Christ ?
Le 2 Juillet inaugure une démarche pour l’annonce du salut et le combat pour la justice. La cérémonie de la Primatiale est un point de départ pour un peuple en marche et non un exorcisme pour des peureux qui se rassurent en donnant dans l’excessif.
Je découvre dans cette préparation l’ambivalence, voire l’ambiguïté, de toute entreprise chrétienne. Seules la foi, la prière, l’offrande, l’ascèse peuvent nous débarrasser des scories du point d’honneur.
Faut-il encore que je rappelle l’essentiel à tous ces volontaires de la « bonne volonté » ? Je crois qu’ils agissent fondamentalement pour que le Royaume de Dieu s’approche d’un grand nombre. A temps et à contretemps, comme eux et avec eux, je dois me soumettre à l’initiative de l’Esprit qui purifie toutes les démarches humaines.
Ainsi s’organisent les logiques terrestres. Elles nous conduisent et réduisent peut-être l’innocence de la foi. Nous n’avons à notre disposition que les promesses du Seigneur. « Voici que je suis avec vous ».
Ta présence nous sauve. Si elle ne lève pas les ambiguïtés de l’action, elle les baptise et les sanctifie. Dans l’imparfait apparaît le signe de Dieu.
25 juin 1995
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